L’école est finie !

Le premier article d’un site internet est assez primordial étant donné qu’il va en donner le ton. Quoi de mieux du coup que de parler de l’excellent court métrage L’école est finie (Crève Salope).

Ce court-métrage de 7 min paru en 1975, réalisé par Jules Celma avec la voix de Philippe Noiret et produit par le Groupe des Cinéastes Indépendants, est un film d’inspiration situationniste qui traite de l’école et de la place de l’enfant dans la société.

L’inspiration situationniste de ce film est assez claire au vu du thème abordé que ce soit par la teneur des propos, avec certains néologismes qui y sont employés comme éducastrateur par exemple, ou que ce soit par l’esthétique qui s’en dégage (utilisation de noir et blanc, voix monocorde, utilisation de technique de détournement d’image).

La franchise de certains propos est également à souligner à l’image d’ « Enseignant, tu es une salope » ou d’autres propos (bien plus direct) tenu peu après et expliquant notamment de quoi l’enseignant est responsable. À là toute fin du film, deux phrases fortes en symboliques sont prononcées : « Les révolutionnaires seront des enfants où ne seront pas », « La révolution sera un jeu d’enfant où ne seras pas ». En effet, ces phrases revêtent d’un caractère symbolique fort étant donné qu’elles explicitent clairement que la révolution ne pourra se faire sans les enfants, la révolution en fin de compte ne pourra se produire en gardant les écoles.

Si on décortique un peu plus ce film, on peut observer qu’il ne se contente pas de parler exclusivement de l’école ou de remettre les enseignants à leur place. Il traite également de la place de l’enfant en tant que tel, dès sa naissance : « A la naissance, […] c’est l’adulte qui tient en main l’enfant, et non l’inverse ». Le film critique du coup à juste titre l’aliénation que font subir les adultes aux enfants « l’enfant n’est plus qu’un tondu parmi des chauves, un bègue parmi des muets ». Le film soulève du coup que l’enfant ne peut pas jouir librement de son enfance comme il l’entend, l’adulte le malaxe comme de la pâte à modeler pour le faire rentrer dans un moule, l’école lui facilitant le travail, et l’enseignant exécutant la tâche de s’assurer que l’enfant s’adapte au moule de son plein grès ou de force. Le film démontre du coup que la destinée d’un enfant et le rôle de l’école par la même occasion et de finir comme un adulte, c’est-à-dire de travailler, que ce soit pour un patron, un parti ou une cause. L’enfant fini dénaturalisé honteux de ces désirs, mais « prêt aux travaux forcé et à l’agonie quotidienne ». Afin d’arriver à ce destin funeste, la famille et l’école vont transmettre les « éléments para-moraux-militaire » qui feront de l’enfant un esclave, en somme, un adulte aliéné : « Tu vas penser comme un adulte, comme les chefs des adultes (citations de plusieurs noms de dirigeants moraux-autoritaire comme Jésus-Christ, Trotski, Castro ou encore George Marchais) ».

L’enseignant, en exécutant cette tâche de dénaturaliser l’enfant est également responsable. Ce que Jules Celma n’hésite pas à souligner, car que l’enseignant soit de gauche ou de droite (quelle différence à vrai dire quand on parle d’un enseignant ?), il reste « tristement vieux et con ». De plus, l’enseignant sera toujours placé en tête des fonctionnaires satisfaits de par le respect qu’il donne à sa hiérarchie, mais également de par le respect dont il honore l’école républicaine et qu’il s’évertue même à défendre lors de grandes processions syndicales ritualisées. Et ce peu importe qu’il soit réactionnaire, syndicaliste, avant-gardiste ou réformiste. En réalité pour ce film, l’enseignant est : « insectisidement nuisible, car tu (l’enseignant) es dangereux pour l’espèce humaine, car c’est toi qui as construit les écoles et les camps de concentration, car c’est toi qui as noyé les marins de Kronstadt, car c’est toi qui as assassiné Nestor Makno […] ».

Si vous souhaitez voir ce film, il est disponible gratuitement sur youTube juste ici :